En pareil jour, le 6 novembre 1975, nous avions donné le départ de la marche verte bénie qui devait consacrer l'unité de notre cher pays, du détroit au Sahara.
Nous nous devons de nous féliciter de ce succès auquel Dieu nous à prédestinés, et de cette victoire voulue par le Tout-Puissant comme l'œuvre de notre génération.
Nous devons en rendre grâce à Dieu.
Il nous appartient de tirer la leçon de cette marche et de la mobilisation de tout le peuple qui en a profondément saisi la signification et la portée, puissions-nous donc en tirer tous les enseignements éclairant la voie que ce paisible pays doit poursuivre s'il entend rester digne de son passé et de son présent.
Cher peuple,
Il y a un mois, une autre marche a été lancée. Je ne l'appellerais pas ''marche de la démocratie', car la démocratie est, avant tout, sensibilité, conviction et foi. La démocratie à une définition et jusqu'à l'année dernière, elle en avait plusieurs -selon les systèmes, les continents, les pays et les peuples-. Je n'affirme donc pas que nous nous sommes engagés sur la voie de la démocratie et dans la marche démocratique, mais plutôt dans celle de l'éthique politique, de la répartition des pouvoirs politiques, du respect des droits politiques et humains et de la décision prise unanimement par la collectivité. "Ma communauté ne saurait être unanime dans l'erreur'' a dit le prophète.
Entendons par collectivité celle qui puise sa force non pas dans la puissance physique et le chantage, ou celle fondée sur le pouvoir de l'argent, mais plutôt celle mue par la foi, l'inspiration et le patriotisme authentique.
Saches, cher peuple, que ce qui nous attend n'est pas une affaire de six ou dix années, mais une conduite vertueuse constante, sans cesse réaffirmée tendant vers le meilleur et nullement vers le pire. Ce qui nous attend, c'est la maitrise de soi, le refoulement des passions et le rejet absolu de tout ce qui peut sentir la fraude ou la tricherie. La vie -Je ne dis pas démocratique mais parlementaire- implique une telle conduite. La démocratie est un concept large dont personne ne peut cerner les contours.
Il est loisible pour quiconque en effet de se prévaloir de la démocratie, prise dans son acception la plus large, même quand il se permet d'agir à sa guise, exécutant ou emprisonnant qu'il veut au nom de cette même démocratie.
Le système constitutionnel et parlementaire exige avant tout de l'électeur et de l'élu la fidélité au dépôt sacré (Al-amana), dépôt d'une responsabilité qui transcende le mandat, car transmise au second par le premier et au troisième par le second, même s'ils n'appartiennent, ni l'un ni l'autre, au même parti ou syndicat. D’un dépôt de cette nature, le prophète - béni soit-Il - a dit : quand les affaires sont confiées à ceux qui n'en sont pas dignes, il n'y a plus qu'à attendre l'heure du jugement dernier". Quand le dépôt sacré n'est pas préservé, c’est l'annonce de cette fin inéluctable.
Dieu a dit :
"O, vous qui croyez, Dieu vous ordonne de restituer les dépôts'' (Coran), ce qui signifie : à chaque instant de son existence, chacun de nous, qu'il soit électeur ou élu, doit avoir le sentiment d'assumer la politique de l'Etat, directement ou indirectement.
Si un tel sentiment existe et procède d'un esprit civique authentique, celui qui le porte ne peut dormir la conscience tranquille, il est toujours mu par le sentiment qu'il est de son devoir de s'adonner corps et âme à son travail, de jour comme de nuit, qu’il soit électeur ou élu.
Telle est, cher peuple, la marche que J'ai ouverte pour toi, non pas une marche de dix jours ou de dix ans, mais une marche qu'il nous appartient d'entamer non seulement pour cette année, cette décennie ou ce siècle, mais que nous devrions situer dans la projection des siècles à venir.
Ce faisant nous y serons accoutumés et nous y habituerons nos enfants, qui, à leur tour, transmettront ce legs à leurs descendants, ce qui exige, cher peuple, le respect de la constitution et du régime constitutionnel parlementaire.
Si nous portons atteinte au charisme de nos institutions démocratiques élues en les réduisant à un simple exercice parlementaire limité à six ou douze années. Nous aurons agi comme celui qui, semant le vent, ne peut récolter que la tempête. Si nous voulons, cher peuple, cueillir les fruits de notre expérience, il faut nous persuader qu'au-delà des résultats, c'est bien l'avenir qui est en jeu.
Abordons donc cette perspective avec foi et dignité. De même que nous pénétrons dans les mosquées, notamment celles des lieux-saints, dans un profond recueillement, il nous appartient de nous engager dans la vie constitutionnelle et parlementaire avec une égale ferveur et de mener cette expérience avec sérieux et abnégation, s'agissant d'une question vitale.
En effet, notre monde moderne ne saurait s'écarter de cette voie. Quant à toi, cher peuple, par nature et par fidélité à ton passé, tu es voué à faire preuve d'une conduite morale exemplaire, à œuvrer, comme en témoigne ton histoire, avec sérieux et persévérance.
Cher peuple.
Nous constituons l'une des nations organisées les plus anciennes dans le monde. Je le dis en toute modestie mais non sans fierté : notre nation date d'il y a mille deux cents ans. Nous sommes un Etat qui a sa devise, doté d'un system, de frontières, de lois et de structures.
Si tel n'était pas le cas, les tempêtes nous auraient balayés et nous aurions été décimés. Nous sommes-grâces en soient rendues à Dieu- toujours debout en dépit des dangers, des vicissitudes et des convoitises.
Nous sommes restés comme un arbre enraciné dans les profondeurs de la terre et dont les branches se dressent vers le ciel, attendant chaque jour du Tout-Puissant qu'il l'arrose, même si ce doit être du sang de ses enfants donnant leurs vies pour en assurer la pérennité.
Cher peuple,
Je ne t'ai pas habitué à de tels propos. Chaque jour, Je lis, J'analyse et Je reçois jour après jour, J'ai de plus en plus la conviction que la vie démocratique, constitutionnelle et parlementaire est inéluctable.
Donc, nous nous devons, que nous le voulions ou non -et en fait nous l'avons voulu et nous le voulons- d'opter pour un tel choix. Car seuls les hommes moralement forts, les peuples sans complexes et les nations dont la voie est clairement définie qui se reflète dans un passé plus que millénaire comme celui du Maroc, peuvent œuvrer dans un tel cadre.
J’implore le Tout-Puissant pour que la marche à laquelle Je te convie, cher peuple, connaisse au fil des générations futures, une évolution ininterrompue.
Elle doit se perfectionner sans cesse, évoluer jour après jour, afin que nous soyons dans le peloton de tête et non à la traine des nations démocratiques.
Cher peuple,
Comme J'ai eu l'occasion de le souligner dans mon dernier discours consacré aux élections municipales et communales, sois convaincu que je crois à la vie parlementaire et constitutionnelle, Je crois au dialogue, Je crois à l'union des gens, à leur intelligence, non à leur force physique ou à leur nombre.
Je m'attache à leur qualité. Si en plus, ils sont nombreux, eh bien, nous ne pouvons qu'en louer Dieu. Je crois à cela et il faut que tu y crois, cher peuple.
Dans un hadith quodssi, Dieu, par la voix du prophète a dit: ''Mes serviteurs, Je me suis interdit l'injustice et je vous ai interdit l'injustice. Ne soyez pas injustes les uns envers les autres".
Pour ma part, Je vous ai dit : Je me suis interdit de tricher et Je vous interdis de tricher dans vos rapports. Il est illicite de tenter de frauder ou que quelqu'un essaie de le faire dans l'exercice d'une responsabilité comme les élections.
L’électeur et l'élu doivent s'en abstenir. La conséquence de la fraude serait supportée par tous, toutes les formations politiques et toutes les centrales syndicales.
Je ne voudrais pas que l'histoire retienne du Maroc qu'il n'a pu atteindre des objectifs à sa portée, faute de ne pas avoir fait preuve de sérieux et de conscience politique.
Cher peuple,
Il y a une semaine, je suis rentré d'un périple dans un certain nombre de pays arabes frères. Comme tu as pu le voir, cher peuple, J'y ai été reçu par les souverains, émirs, présidents et peuples avec estime, ferveur et affection.
Au vrai ce n'est pas Hassan II qui a été ainsi accueilli, c'est toi, cher peuple qui l'as été. Toi qui as toujours reflété mes aspirations. Quant à moi, J'ai toujours essayé de satisfaire tes demandes.
C’est le peuple marocain, à qui Je m'adresse ce soir, qui à été l'objet de cette considération des pays frères visites, qui a été honoré par eux. Sois, cher peuple, digne de ces témoignages d'estime et de la promesse divine